Gérard Morel : le solo lui va si bien

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Gérard Morel & la guitare qui l’accompagne à la Cave Poésie. Récital acoustique en solo. Mon dernier concert de l’année. Un régal. Nous descendons à la cave de… la Cave Poésie. Gérard Morel, déjà sur scène, nous attend et nous accueille, assis sur son tabouret rouge.

Photo Michel Gallas
Photo Michel Gallas

Autour de lui, une jolie petite mise en place : une guitare bien sûr, une table basse avec bouteille et verre d’eau sur une nappe rouge, rouge comme le tabouret sur lequel il est assis, rouge comme ses chaussures et sa chemise, rouge comme le pupitre avec la liste des chansons. Une cave voutée magnifique, cet endroit intimiste et convivial est particulièrement adapté à un solo acoustique. Le partage peut commencer. Pas de micro. Plaisir des mots, hymne aux femmes, aux bons mets et au bon vin, à la vie en fait. Un concert dégustation. Morel ou le plaisir d’être sur scène, sourire complice et « bonne bouille,» de grandes qualités de comédien et ce soir-là un public réceptif mélange de connaisseurs et de nouveaux. Jeu de guitare et belles mélodies : les chansons parfois reviennent plus fortes qu’avec certaines orchestrations. Un répertoire particulièrement bien choisi. Un grand et beau moment.

Je peux être considéré comme un inconditionnel de Gérard Morel, car j’ai vu tous ses spectacles. J’ai apprécié les différentes déclinaisons, au fil des ans et des spectacles de Gérard Morel &  les garçons / le duette / toute la clique / la guitare / l’homme orchestre qui l’accompagne(nt). Sans parler d’un concert à trois avec Rocca et Wally créé pour le festival Aubercail. Le spectacle que j’ai préféré c’est peut-être… le solo, déjà vu à la Cave Poésie il y a presque trois ans.

Photo Michel Gallas
Photo Michel Gallas

Et j’ai la chance de l’apprécier à nouveau. Un concert rôdé, une grande maîtrise de la scène. Il fait participer le public, comme un partenaire, dès le premier titre. En début de concert, il a plutôt (et donc plus tôt) les chansons anciennes et que j’appelle chansons performance ou exercice de style. Performance d’écriture comme Le bon gars pas dégueu pour ses rimes en « a / e / i / o / u » avec laquelle il démarre le concert. Puis performance d’écriture et de souffle pour Charlotte (avec les rimes en ote) dont « Quand j’la bichote Elle me baisote Jamais elle mégote On se bécote On se dorlote Et on se tripote Elle est dévote Quand j’la langotte Là où elle frisotte Et moi je fayote Quand elle me suçote Mes petites griottes. » Pour La vache de greluche avec les rimes en « che » il nous dit « J’ai appris dans un stage Ecris tes chansons toi-même qu’il faut éviter d’abuser du son « che » très pénible à sonoriser. Mais moi … je ne suis pas sonorisé ! » Auteur libre qui fait des chansons de plus de six couplets souvent sans refrain avec des rimes et des mots que l’on trouve parfois en cherchant bien dans un dico mais plus rarement dans une chanson. Ceux qui me connaissent savent que je suis hyper sensible aux jeux de mots et aux jeux avec les mots : d’où quasi une jouissance de réécouter Olga « Ajaccio elle n’aime pas Mais Calvi si / Que j’aime Olga ça c’est sûr papa, Qu’Olga m’aime non ». Mais Morel ce n’est pas uniquement de la performance d’écriture c’est aussi des mélodies limpides, des mots qui font sens, une interprétation fluide : écoute un peu La java de Claire et Clément, peut-être ma préférée. Mais en fait dans ce concert florilège il chante… la quasi totalité de mes préférées.

A l’aise sur scène, entre les chansons, l’épicurien évoque, avec émotion, le cassoulet aux fèves mangé la veille au soir ; plaisante avec son public et lui parle comme avec un ami en associant texte appris et belle réactivité.

Photo Michel Gallas
Photo Michel Gallas

Au fil des disques et des années, l’amour des mots persiste mais se met au service de la tendresse. Comme sur ces deux pépites Il pleut des cordes originale description d’une grasse matinée et Le nu te va si bien une superbe chanson… d’amour. Il glissera trois titres inédits sur disque : la tendre Stances à sa gorge, la chanson de scène Le tango du lumbago et en rappel Chanson à la con où l’artisan chantiste évoque la fabrication d’une chanson. Derrière le bon vivant et les chansons d’humour et d’amour on pressent, en filigrane, le citoyen. Dans Brève rencontre (avec rimes en « al »), cela démarre joliment « frimousse en pétale / yeux bleu d’opale / regard boréal / la moue virginale / la dent cannibale » continue avec « moi c’est normal je tiens plus dans mon futal » pour finir avec « Elle avait le front national, moi c’est normal, j’ai vomi sur ses sandales.» En préambule d’Hymne à mon beau-frère, il nous parle des déplacements en tracteur en Afrique de celui-ci « pour une association qui a récolté de l’argent et mène des actions très concrètes pour essayer de contribuer à leur rendre ce qu’on leur pique depuis des siècles » Un humain libre.

J’avais sollicité quelques minutes d’interview. Et j’ai eu le plaisir de me retrouver à côté de lui, à partager un joli moment, en petit comité, dans un petit resto, pas loin de la Cave poésie, derrière Saint-Sernin (Saint-Sernin cela aurait pu être un joli nom de vin bien que « Saint-Pourçain c’est cent pour cent plus sain » comme dit dans le gouleyant Cantique en toque, dernier titre de son concert et repris en chœur par les spectateurs ).

Photo Michel Gallas
Photo Michel Gallas

Collation toulousaine d’après concert : Foie gras, magret, Gaillac, fromage et rhum. Bien sûr, on a parlé de ses spectacles mais mon appareil enregistreur est resté au fond du sac et à aucun moment je n’ai pensé à aller le chercher. Il a évoqué son plaisir à jouer sans micro ou avec un micro cravate HF qui le laisse autonome, de ses plaisirs de comédien et de metteur en scène. Comme pour la mise en scène de Où vont les chevaux quand ils dorment ? le magnifique spectacle hommage à Leprest avec Didier, Guidoni et Jamait. Ou celle de Gare à Riffard, spectacle collectif en hommage à Roger Riffard, chanteur méconnu, qu’il évoque avant d’interpréter sa Java du solitaire, la seule reprise de son propre concert solo. Il m’a mis l’eau à la bouche pour son spectacle La guinguette des fines gueules où un vrai repas est servi pendant le spectacle. Il m’a aussi mis l’eau à la bouche pour un prochain spectacle sur Brassens qu’il va créer en 2016 (je me souviens du plaisir que j’ai eu à l’entendre interpréter La religieuse à Avignon et La Marche nuptiale, en Italien, à son précédent passage à la Cave Poésie). Il me dira quelques mots aussi sur la naissance et l’écriture de mes titres préférés mais t’avais qu’à venir avec nous : pour cette fois, je garde l’information pour moi. Je peux juste te dire, en guise de conclusion devinette qu’il connait très bien la grand-mère d’un chanteur toulousain dont je t’ai parlé plusieurs fois dans Hexagone (envoie-moi ta proposition en commentaire !) Et je résumerai le concert en m’adressant à cet amoureux des spectacles collectifs : « Gérard le solo te va si bien ! » et à toi Hexagonaute de tout l’hexagone va voir sur son site car des dates de ce solo (et d’autres spectacles) sont planifiées pour les quatre premiers mois de 2016. Ne rate pas Gérard Morel !


Gérard Morel le 23 décembre à la Cave Poésie (où il a chanté aussi les 22, 24 et 26 décembre) à Toulouse (31).

Gérard Morel est aussi président du Centre de la chanson (Hexagone t’en a parlé récemment).

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