D’entrée, le bretteur suisse – puisqu’il ressemble désormais à d’Artagnan trente ans après – mouche Barclay, son précédent label, qu’il a quitté pour Polydor. Avec panache mais en douceur, grâce aux formules sans fioritures de l’ami Philippe Djian. Monsieur, je ne sais pas trop fait d’ailleurs écho à ce Si tu veux (que je chante). Les chansons alémaniques sont quant à elles signées Martin Suter. La voix d’Eicher s’y fait parfois plus grave, presque chuchotante, révélant la musicalité d’un dialecte aux sonorités chuintantes ; puis reprend une hauteur presque féminine – la signature sonore d’Eicher – dans la superbe Prisonnière. Les autres titres sont empreints d’une nostalgie dénuée d’amertume, portés par des mélodies tantôt folk (Je n’attendrai pas, Homeless song), parfois pop (La fête est finie avec Miossec et Axelle Red), mais toujours très orchestrées (Wie einem der Gewissheit hat). Eicher nous entraîne même dans une valse délicieusement envoûtante (Gang nid eso). Haiku – Papillons, contrepoint de Broken – paradoxalement aussi long que ce dernier est court –, marie parfaitement ses doubles cultures, germanique et française, classique et pop. Le refrain « où que tu ailles, où que tu sois » pourrait bien devenir une rengaine aussi entêtante que Déjeuner en paix ou Pas d’ami comme toi.
Mad
- Stephan Eicher
- Homeless songs
- polydor – 2019
- Chronique parue dans le numéro 14 de la revue Hexagone.