Pacifiste inconnu, un hommage, une re-lecture, … de l’émotion

1
2471
Photo Aurélie Cabarrot
Photo Aurélie Cabarrot

A peine remis de la soirée « Fredo chante Renaud » à l’Observatoire de Cergy-Pontoise, c’est une nouvelle affiche, non moins attirante, qui nous attend cette fois le mardi 21 Avril 2015 au Studio de l’Ermitage, à Paris. Ué ué c’était y’a longtemps, j’ai trainé toussa toussa, MAIS, ils refont leur spectacle dans quelques jours, le 21 mai ! Donc toi, là, qui lis mon article je sens qu’après une brève description et les ptites vidéos qui vont bien, tu vas directos réserver ton jeudi et aller voir ce superbe spectacle.

Rien que le titre du spectacle nous accroche d’emblée : « Pacifiste inconnu, » ça en jette !

Et ça, c’est avant de savoir qui sont les deux artistes qui se cachent derrière : Jehan et Lionel Suarez, rien que ça ! Sans compter un troisième nom, qui fait frissonner dans les ruelles parisiennes, que l’on évoque toujours des étoiles plein les yeux, et qui ne saurait s’éteindre de sitôt … Allain Leprest ! Car « Pacifiste inconnu » c’est bien ça avant tout : un hommage à ce grand, que dis-je, ce géant de la chanson qu’était Leprest ; une re-lecture de son univers, de ses mots, de sa musique, dans un format intimiste comme on les aime. La description succincte de l’évènement se termine sur ces mots : « Vous ne connaissiez pas Allain ? Vous avez de la chance, vous avez ça devant vous. ». On n’en peut plus, on fonce !

Arrivés à l’ouverture des portes, on découvre tranquillement le lieu du spectacle : le Studio de l’Ermitage. Première fois que l’on entendait parler de ce nom, mais pour sûr, c’est notre ignorance qui est en cause ! Perché sur les hauteurs de Ménilmontant, l’entrée se fait par une petite porte qui ne paie pas de mine et pourtant… On se retrouve dans un intérieur agencé de manière très chic, ça respire l’authenticité : parquet, mobilier en bois, des petites tables pour se poser devant la scène, une ambiance décontracte… Et sans compter les affiches des concerts précédents ou à venir, qui imposent le respect : Sidi Bemol, André Minvielle, entre autres ! Une programmation éclectique portée essentiellement sur le jazz et les musiques du monde, que du bon !

Photo Aurélie Cabarrot
Photo Aurélie Cabarrot

Bon c’est pas tout, mais ce soir on est venus voir « Pacifiste inconnu » et ces deux artistes qu’on apprécie tout particulièrement. Jehan pour commencer ; on le connaissait notamment pour ses interprétations de Bernard Dimey, voilà qu’il remet ça avec Leprest ! Claude Nougaro lui-même résume bien cet artiste : « JeHan s’avance sur la scène vivante de l’émotion et si le cœur est le muscle de l’amour, ah ! Que voilà un bel athlète ! »

Lionel Suarez, ensuite ; originaire de l’Aveyron, il est initié très jeune à la musique et aux rythmes par sa famille puis poursuit son cursus musical de manière plus « orthodoxe. » C’est ensuite qu’il s’initie lui-même, en autodidacte, à l’improvisation et l’accordéon jazz. Il rencontre JeHan sur les scènes de la région toulousaine et vadrouille pas mal avec lui, mais travaille aussi rapidement avec des artistes comme Zebda, Art Mengo ou Claude Nougaro, qui reconnaissent ses énormes qualités d’accompagnateur et de soliste. On le retrouve cette année sur scène notamment avec Sanseverino, mais aussi dans un spectacle autour de Piaf (« Piaf, l’être intime ») et… JeHan, pour une création inédite !

Tu connaissais probablement déjà tout ça, mais comment peut-on ne pas représenter ces deux artistes, dont l’histoire musicale (et humaine) forge le respect autant pour l’un que pour l’autre ? Imagine donc le mélange détonnant qui peut se produire lorsque l’on met ensemble ces deux-là, et qu’en guise de fouet (de cuisine, hein) on utilise Leprest pour homogénéiser les deux univers ! Hé bien, c’est bien de ça dont il est question ; et le moins qu’on puisse dire, c’est que ça envoie !

Photo Aurélie Cabarrot
Photo Aurélie Cabarrot

Et ça débute avec « Êtes-vous là » avant un enchaînement de chansons comme on les aime : C’est peut être, Rue Blondin, Bien avancés, C’est drôle, Ton cul est rond, Etrange … Tantôt dans l’émotion pure, tantôt dans la rage, tantôt dans la fragilité, ou encore dans le bonheur amer. Ce sont des torrents d’émotion qui se déchainent sur le public, et qui font du spectacle une expérience unique en son genre ; on retrouve vraiment du Jehan, du Suarez et du Leprest qui se mêlent et s’entremêlent. Je dirais même que chacun met l’autre en avant nous faisant redécouvrir leur sensibilité et leur beauté.

JeHan, sa voix ronde et profonde, son interprétation à toute épreuve ; nous énerve autant qu’il nous fait rire, nous donne le sourire autant qu’il nous fait pleurer, impossible de le lâcher des yeux… Solidement ancré sur sa scène, s’accompagnant parfois d’une guitare au besoin mais jamais trop, il impose sa présence et son charisme. Première rencontre pour ma part, je suis restée absorbée par ce grand monsieur à la voix qui « fait trembler l’intérieur ». Il nous livre en plus une interprétation dans la simplicité, sans chichis. Juste sa voix (pas la peine de parler de technique vocale ou je ne sais quoi, écoute, tu sauras !), son petit accent, et lui, qui donne sans compter ce qu’il ressent en interprétant ces titres. Sa gêne et ses bafouillages lors des transitions ne font que rajouter au charme et à l’intimité ambiante.

On n’en perd pas une miette, car on ne peut tout simplement pas décrocher du début à la fin ; putain, qu’est-ce que c’est beau !

Photo Aurélie Cabarrot
Photo Aurélie Cabarrot

A côté de lui, Lionel Suarez tient parfaitement son rôle; l’accompagnement reflète les textes, subtil tout en restant énergique, c’est toujours très bien placé. Qui a dit qu’un accordéon ne suffisait pas à assurer un concert à lui seul ? Suarez nous prouve encore une fois le contraire, alternant les sonorités de manière cohérente, alternant les rythmiques également, on n’a jamais l’impression d’entendre des choses identiques ! Parlons-en de ces fameuses rythmiques… On te disait que Suarez avait été formé aux rythmiques, notamment par son grand-père batteur ; et ça se sent ! Que de travail sur ce point ! Loin des accompagnements accordéon « classiques », Suarez s’affranchit des limites rythmiques, et nous propose un panel rarement entendu ; jeu sur les contretemps, effets stéréo main droite / main gauche, jeux de soufflet, … Tout y passe, et c’est incroyable ! Jamais trop présent cependant, et tout en nuances, en sa qualité de très bon accompagnateur, il sait laisser la place au chant, se contentant de mettre les mots en valeur. « Où vont les chevaux quand ils dorment » pourra te donner un aperçu avec l’intro de Lionel Suarez, seul, enfin, avec l’accordéon quand même !

Photo Aurélie Cabarrot
Photo Aurélie Cabarrot

Le spectacle reste simple en apparence, on sent une fragilité et une pudeur bouleversante chez chacun des deux artistes ; on sent également dans cette retenue un respect incroyable pour l’artiste qu’ils reprennent, Allain Leprest. Et c’est toute la salle qui est touchée par ces émotions, qui se souvient (ou bien qui découvre) le grand homme qu’il était, et c’est en communion que le public rend hommage, à sa manière, à sa mémoire. Ils clôturent la soirée avec quelques reprises de Bernard Dimey dont « J’aimerai tant savoir », que j’aime beaucoup. Et c’est avec quelques larmes au bord des yeux que la lumière se rallume. Les applaudissements sont fournis et je sens la salle, tout comme moi, encore un peu bouleversée, émue. On ne s’en va pas tout de suite, on reprend un verre, on discute un peu, comme pour prolonger un peu le spectacle, laisser le temps en suspens…

En résumé, encore une sacrée soirée ! Alors pour ceux qui n’étaient pas de la partie, n’oubliez pas votre prochain rendez-vous, au Studio de l’Ermitage jeudi 21 Mai ; à ne rater sous aucun prétexte !


1 COMMENTAIRE

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici