Le rock psychédélique, héritier du Londres swinguant des sixties, continue à inspirer de jeunes musiciens de ce côté-ci de la Manche. Pour preuve ce premier opus, chatoyant et résolument moderne, des Toulousains de Ceylon. Un jeu de noms évocateur de voyages musicaux, lesquels sur scène s’étendent presque à l’infini. Six titres au long cours, véritables invitations à la transe, contemplative autant que littéraire. L’ombre des Doors plane sans surprise sur Le 5 et sur la plupart des morceaux grâce à la guitare de Tristan Chevalier et aux instruments de ses trois complices. La voix singulière de Louise Holt est pour beaucoup dans le sentiment d’envoûtement qui vous prend à l’écoute de la musique de Ceylon. Un timbre limpide et cristallin qui sait se faire enfantin et torturé, enflammé et rageur. Vous avez dit théâtral ? Certes, mais Louise mêle avec intelligence sa prose on ne peut plus contemporaine à celles de ses auteurs de prédilection. Pour dépeindre les affres de Mon ami, personnage abstrait qui tente de comprendre ses lamentations solitaires, elle emprunte deux vers évocateurs et émouvants à Cyrano de Bergerac – « Mon ami, j’ai de mauvaises heures ! / De me sentir si laid, parfois, tout seul… » – et vole à Shakespeare ses rimes fleuries de Roméo et Juliette. La jeune chanteuse s’empare également de son prince du Danemark et l’incarne dans toute sa dualité, sa complexité, le faisant roi ou l’imaginant à Hollywood jouer à être ou ne pas être…
Mad
-
-
- Ceylon
- Où ça en est
- auto production – 2020
- Chronique parue dans le numéro 15 de la revue Hexagone.
-