Garance, on ne badine pas avec la mue

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© David Desreumaux
© David Desreumaux

Le 17 janvier dernier, Garance investissait la petite salle de l’Essaïon, à Paris, pour sa première. Elle y chante tous les mercredis à 19:45. Depuis la sortie de son dernier EP huit titres, Les idées rock, en 2014, Garance a emmagasiné dans sa besace quantité de chansons nouvelles et le public s’attend-il tout naturellement à entendre ces chansons-là. Et il n’est pas déçu.

Il n’est pas déçu et cependant (agréablement) surpris de ne pas assister à un tour de chant classique mais à un spectacle plein et entier – certes encore en rodage et à ajuster – mais à un spectacle qui présente un contenu riche par une artiste qui domine son sujet. Un spectacle construit, avec une dramaturgie comme l’on en voit bien trop rarement de nos jours.

A avoir apprécié régulièrement Garance la guitare en bandoulière, on en aurait presque oublié que c’est au théâtre qu’elle a fait ses premières armes. L’Essaïon et sa série de dates permettent ainsi à cette ancienne élève du cours Florent de présenter nombres de nouveaux titres en une mise en scène forte et intelligente qui puise ses intermèdes (et son rythme donc) entre le théâtre classique de Racine à Musset et les propos féministes et lumineux de Benoîte Groult. Garance prouve ici que l’on n’a pas à choisir entre être « ça ou ça », mais que l’on a tout à gagner à être « ça et ça ».

© David Desreumaux

Durant ces soixante minutes éclair, Garance – toute de noir vêtue – se donne à voir et à entendre dans ses moindres reliefs. Après un début de set axé autour de ses « classiques » histoire de se mettre en jambes et en confiance, c’est une Garance profonde et décidée qui attrape la salle par les sentiments. Elle ne la lâchera plus. La langue est fleurie à l’envi pour énoncer des situations crues, se fait plus âpre et incisive pour balancer son porc, mais sait se faire tendre voire érotique pour rappeler que ce n’est pas parce que l’on fustige certains comportements que l’on est dépourvue d’amour.

Parfois, après l’amour vient le mépris, après le mépris vient la colère qui engendre Zagreb, point d’orgue de ce spectacle prometteur qui révèle une écriture personnelle et racée, décomplexée. Sur ce terrain de l’expérience personnelle, quand le rire est tombé et s’est mué entre prise de conscience et règlement de comptes, le spectacle gagne en intensité et Garance devient redoutable. C’est cette fille-là que l’on aime. Une meuf haute comme trois pommes qui n’a pas froid aux yeux et qui a décidé d’en découdre en chanson. Chanter, c’est la vie. Chanter sa vie ou celle des autres est un acte d’engagement fort. Respect Garance.

A noter que Garance convie un artiste chaque mercredi pour un duo. Hier soir, c’est Benoît Dorémus qui était de service pour notre plus grand plaisir.

Garance est à L’Essaïon jusqu’au 21 février. Elle fera également le festival d’Avignon l’été prochain. On la reverra avec bonheur.


© David Desreumaux

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