Omar et mon accordéon, « Je suis de l’école des Ogres et des Têtes Raides »

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Photo LR

Omar a vraiment fait ses débuts dans la chanson aux Valseuses, dans les Pentes de la Croix-Rousse à Lyon. Dans ce bar musical, il lui a fallu jouer de tous ses talents d’improvisateur pour capter l’attention du public. Mais aujourd’hui il a fait son chemin. Il écrit et compose ses chansons et il a un rendez-vous important avec le public lyonnais à l’occasion du festival des Chants de Mars. Il y assure en effet la première partie de Zoufris Maracas, une belle occasion pour lui de faire connaître son travail. Ce festival va débuter mardi avec les « 24 heures du mot » proposés par A Thou Bout d’Chant. Quelques dates sont depuis longtemps complètes (Miossec, GiedRé) mais il reste beaucoup d’occasions pour faire de belles découvertes dans les nombreuses salles partenaires du festival.

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Hexagone : D’où viens-tu Omar ?
Omar : Je suis né en Algérie et je suis arrivé en France avec mon oncle et ma tante, à Paris puis en Bourgogne. Quand j’ai eu 7 ans, ils m’ont demandé si je voulais faire de la musique. Tous les dimanches je regardais des westerns avec mon oncle et je voyais un cow-boy qui jouait de l’harmonica. Je leur ai donc répondu que je voulais faire de l’accordéon car j’avais confondu accordéon et harmonica, ce qui a fait la joie de mes parents. Je me suis donc retrouvé avec un harmonica de 11 kilos sur les genoux. Par fierté je n’ai rien dit et j’ai donc appris l’accordéon jusqu’à mes 14 ans. C’était vraiment du musette, je commençais à écouter du rap et de la pop et j’ai arrêté. J’ai donc dit à mon prof que je voulais jouer du saxophone. Dans l’orchestre de jazz du village, il manquait un trompettiste, mon prof m’a alors fait jouer de la trompette. J’ai adoré la trompette et j’ai intégré le big band de jazz du village. Ensuite au lycée, avec les potes, on écoutait du reggae et j’ai commencé à dériver un peu en participant à des groupes de reggae, de ska. J’ai commencé aussi dans la chanson française avec un groupe qui avait une petite notoriété locale. Ils m’ont fait ressortir mon accordéon et c’est là que j’ai commencé à en jouer vraiment.

Hexagone : Tu as quitté la Bourgogne pour venir t’installer à Lyon.
Omar : J’ai d’abord été monteur de chapiteaux pour les Chapiteaux Latcho Drom des Ogres de Barback. Je suis arrivé ensuite à Lyon et j’ai travaillé à la MJC de Rilleux-la-Pape pendant 4 ans en tant que coordinateur. L’envie de faire de la musique m’est revenue à ce moment là et je suis reparti en solo en passant par les Valseuses à la Croix-Rousse. J’avais rencontré par hasard le patron des Valseuses qui m’a invité à y venir jouer le mercredi. Comme je n’avais plus d’accordéon utilisable, j’ai emprunté celui du patron, d’où mon nom de scène « Omar et mon accordéon ». Le public a commencé à venir de plus en plus nombreux le mercredi et ça a donc été un vrai tremplin pour moi. C’est aussi là bas, que j’ai commencé en même temps à écrire des chansons et les Valseuses ont été pour moi un vrai laboratoire où je continue toujours à chanter.

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Hexagone : Tu fais souvent de la chanson improvisée ?
Omar : L’improvisation à été toujours facile pour moi et ça me permettait de chanter quand je n’avais pas encore de chansons. À mes débuts aux Valseuses, je ne prévoyais rien, j’improvisais donc beaucoup en fonction des gens qui étaient dans la salle. D’un coup, ils se rendaient compte que je parlais d’eux et ça les faisait rire. Je continue toujours à improviser, même si c’est plus difficile dans une grande salle. Ça reste un bon moyen de capter l’attention. Quand tu fais tes chansons, tu te confies, tu parles de toi, tu racontes ta vie, alors qu’avec l’improvisation tu dialogues, tu interpelles les gens en parlant d’eux. De cette façon je crée un lien direct avec les spectateurs. Une fois que je les ai vraiment captés, je peux leur faire découvrir l’une de mes chansons.

Hexagone : Maintenant tu écris donc tes chansons ?
Omar : En fait j’écris depuis que je suis tout petit. J’avais des petits carnets quand j’étais gamin. J’y écrivais des phrases, puis un peu de poésie et après des chansons. J’ai continué plus tard quand je me suis mis vraiment à la musique. Je me suis fait vraiment tout seul, je ne suis jamais allé taper à la porte d’une boîte de production. Je n’ai jamais démarché pour trouver des dates de concerts, ou envoyé un CD à des salles et, jusqu’à présent, les propositions venaient d’elles même. J’ai eu la chance que Tartine Production s’intéresse à moi et m’inclut dans son catalogue. Ils m’accompagnent dans mon développement et me proposent des dates. Maintenant j’ai toujours un accordéoniste qui m’accompagne. On a fait une résidence ensemble et sorti un EP de 5 titres intitulé Madame.

Photo Aurore Vinot
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Hexagone : Tu es donc accompagné par d’autres musiciens ?
Omar : J’aime jouer avec différents musiciens, parce que chaque collaboration apporte quelque chose de nouveau.
Je joue toujours avec Mouz, le patron des Valseuses. Et depuis un an, je travaille avec Eric un accordéoniste parisien et Boris qui jongle entre la clarinette basse et le saxophone soprano. Ca me permet de rester créatif, de changer d’univers pour ne pas rester enfermé dans un seul style et de me concentrer sur mon écriture.

Hexagone : Tu t’accompagnes aussi à la guitare ?
Omar : Quand j’étais petit, j’adorais le style d’Antonio Banderas qui trainait le long des routes, une housse de guitare sur le dos. Avec les copains, on s’est donc acheté des housses de guitare mais sans guitare pour se balader avec dans le village. Un jour, on s’est quand même décidé à se procurer des guitares et c’est là que j’ai appris en autodidacte. Je l’avoue, au début c’était surtout pour plaire aux filles. Maintenant que j’ai grandi, je ne m’en sers plus pour les filles, mais pour moi et la musique.

Hexagone : Quels genres de textes écris-tu maintenant ?
Omar : Quand j’étais jeune j’écrivais pour que ça soit joli. Les phrases étaient jolies mais elles n’avaient pas forcement de sens. En grandissant et en écoutant Brel, Ferré, Brassens, j’ai commencé à écrire sur la vie, l’amour. Avec mes chansons je me défoule et ça remplace un psychologue que je ne peux pas me payer. Je n’étais pas trop orienté sur l’engagement car je préférais la poésie. Aujourd’hui, j’aime mettre une pointe d’engagement, en donnant mon point de vue sur tout ce qui se passe autour de nous, sans être moralisateur. Quand j’étais jeune j’avais un ami poète beaucoup plus âgé que moi, Richard. On passait des nuits à échanger des textes, discuter et écouter de la musique. Il m’a beaucoup poussé à sortir de la banalité. Il est mort maintenant mais je garde en tête tous ses conseils. J’aime beaucoup les textes des groupes comme La Goutte ou Feu Chatterton.

Hexagone : Tu passes comment de la chanson à texte à la chanson festive ?
Omar : J’aime bien le côté triste et sentimental de certaines chansons à textes, mais je m’y ennuie très vite. En concert, j’aime croiser les moments de rires, de danse et les morceaux plus calmes. J’aime aussi être là où on ne m’attend pas, et jouer dans les endroits les plus saugrenus. Par exemple, j’ai découvert pour la première fois l’année dernière, les concerts assis. Pour être en adéquation avec l’atmosphère et le public j’ai dû mieux poser ma voix et mes textes. J’ai toujours été fasciné par les images de Brel, Ferré ou Brassens, seuls avec leur guitare entourés d’un public complétement captivé par l’artiste et sa sobriété. Au début, j’avais envie de me faire plaisir, pas de travailler. Maintenant on me propose suffisamment de dates pour que je devienne intermittent. Je peux enfin dire que mon métier c’est d’être musicien. Je ne fais pas de tremplins parce que ça me fait peur et je n’aime pas qu’on me juge, qu’on m’évalue. Je suis de l’école des Ogres et des Têtes Raides où l’on joue partout et tout le temps tout en restant très indépendant.


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