Jean-Michel Boris, oh les beaux jours…

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Photo David Desreumaux

C’était lundi 23 mars dernier, au Vingtième Théâtre, à Paris. Ménilmontant. Un chouette lieu d’environ 200 places qui programme très régulièrement de la chanson avec un réel souci de la qualité. Ce lundi-là – comme chantait Delpech dans une merveilleuse chanson – le Vingtième Théâtre avait confié les manettes au site Nos Enchanteurs. Ben ouais tu vois, je cause des voisins. Quand il y a des trucs de valeur d’organisés dans l’appart’ d’à côté, il faudrait tout de même être sacrément mal embouché pour faire la sourde oreille. De la même façon que je vais te causer de la soirée organisée par la clique à Michel Kemper, sans que tu sois au courant si ça se trouve, sache qu’Hexagone s’occupe également de filer un petit coup de main à FrancoFans. Tous les mois, on filme et monte leurs vidéos des soirées qui se déroulent à Canal 93, à Bobigny.

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Jean-Michel Boris – Photo David Desreumaux

Tu vois, mon Hexagonaute adoré, je crois que dans ce milieu de la chanson qui morfle lourd depuis un paquet de temps, on a tous à gagner à se serrer les coudes et à bosser – sinon ensemble – tout du moins à côté les uns des autres et pas contre. Ou alors tout contre. En gardant nos différences, nos sensibilités, nos styles, nos préférences. Parce qu’au fond, un large tronc commun nous unit, dans un seul but, être le miroir d’une scène de la chanson, animés que nous sommes par l’amour de la rime en musique et des artistes. Voilà.

Photo David Desreumaux
Jérémie Bossone – Photo David Desreumaux

Lundi soir donc, j’y reviens. Nos Enchanteurs avait à coeur de mettre à l’honneur Jean-Michel Boris. Bien vu. Rangé des bécanes depuis 2001, Jean-Michel Boris est une figure majeure du monde de la chanson, j’aurais tendance à dire du music-hall. Parce que j’aime bien ce mot. Il rassemble, comme Monsieur Boris a côtoyé, plusieurs générations d’artistes. Débarqué, par l’entremise de tonton Bruno Coquatrix, à l’Olympia en 1954, comme technicien, Jean-Michel – tu permets que je t’appelle Jean-Michel, quand j’aime je tutoie – finira sa longue et belle carrière comme boss de la plus prestigieuse salle parisienne.

Mais ça, c’est rien. Diriger n’est pas tout. Regarde, aujourd’hui, c’est Vivendi Universal qui a racheté, mais on s’en fout, la salle et sa programmation n’ont plus grande saveur. Non, Jean-Michel Boris, c’est avant toute chose, un amoureux des artistes, du spectacle. Un humain avec un coeur dont on a perdu le moule. Un mec qui a programmé, suivi, aidé, lancé chanteuses et chanteurs, sans souci de chapelle également. Des Bécaud, Brassens, Ferré, Brel, Leprest, etc.

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Monsieur Poli & Sève – Photo David Desreumaux

La soirée, préparée par Norbert Gabriel, avait tout pour séduire Jean-Michel Boris, présent dans l’assistance, qui s’est déclaré très touché par cet hommage. La modestie du bonhomme l’incitait à penser que les gens l’avait oublié depuis 2001. Non mais je te jure, ça va pas non. Les artistes invités à fêter Boris venaient d’horizons musicaux différents, de générations croisées, avaient un programme imposé. Pour chacun, à la grosse, deux reprises du répertoire qui marquèrent les années Boris-Olympia, puis une ou deux compos personnelles. Un choix élégant qui balançait entre gros tubes et moins tubes.

Franchement, il y avait du talent sur scène. La soirée était présentée par Valérie Mischler (en photo de une), comme fil rouge avec une robe noire. Elle poussa même, un peu plus tard, la chansonnette en donnant un frissonnant Si tu me payes un verre de Dimey. Notamment. Mais l’ouverture du bal, c’est le fringant Jérémie Bossone qui l’a donnée. Pas fastoche pour lui qui a été pris en otage d’entrée par les techniciens qui avaient oublié de brancher la DI de sa guitare. Qu’importe, le garçon ne s’est pas démonté et a interprété sans amplification La vie d’artiste de Ferré. C’est qu’il en faut de l’abnégation pour faire face au pied levé, en pareille situation, qui plus est sur une chanson d’un autre – et quel autre ! Un talent monstre ce Bossone ! Il a prouvé, au-delà de ses propres chansons, qu’il est un interprète de tout premier plan. Re-belote avec Et maintenant de Bécaud, accompagné par le frangin Benjamin au clavier. Quand il chante, Bossone, il habite les chansons.

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Rémo Gary – Photo David Desreumaux

Allez, je ne vais pas de te chroniquer le passage de tous les artistes, mais laisse-moi te dire que tous ont apporté un angle, un regard, une couleur aux différentes contributions qui leur ont été suggérées. La Marquise qui a fait groover l’Oncle Archibald de Brassens et qui a bluesifié la Môme de Ferrat, Céline Caussimon qui a ému en évoquant un souvenir de son père qui lui avait acheté Quand il est mort le poète de Bécaud, Louis Ville, toujours sur du Bécaud, qui avec son picking et sa voix caverneuse a renvoyé L’indien de l’autre côté de l’Atlantique, Rémo Gary qui s’est fait La première fille et a offert une version longue époustouflante des Oiseaux de Passage. Brassens et Richepin ont dû en rester sur le cul. Et que dire de Clarika qui dans un superbe Avec le temps a prouvé que ce dernier n’avait aucune prise sur elle.

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Photo David Desreumaux

Je n’oublie pas Monsieur Poli & Sève mais je les conserve volontairement pour la fin. Tout ça parce que j’ai longuement hésité pour savoir quel extrait vidéo j’allais joindre à ce reportage. Et finalement, il m’a semblé naturel que ce soit du Leprest, avec un C’est peut-être, fort bien interprété par Monsieur Poli et Sève. Ce Leprest que Jean-Michel Boris a aidé tout particulièrement et à qui – en grande partie – on doit l’existence de ce live fabuleux à l’Olympia. Leprest, c’est le trait d’union entre les grandes stars du music-hall d’hier et les générations d’aujourd’hui. Il est la pierre d’achoppement de la chanson indépendante actuelle. Il incarne le grand questionnement sur la qualité littéraire d’une oeuvre et sa relative méconnaissance du grand public.

Jean-Michel Boris, très certainement l’avait pressenti. Cet Allain Leprest, C’est peut-être Mozart…


2 Commentaires

  1. En lisant tout ça, je me dis qu’en effet, ça devait être une belle soirée… Une petite précision, le technicien son n’est pas entièrement responsable de l’incident, Jérémie Bossone avait bien respecté son planning balance, mais il y a eu une balance imprévue après son passage, inutile de polémiquer là dessus, c’est dommage pour « La vie d’artiste » avec guitare en son réduit..

  2. Belle solidarité entre les défenseurs de la chanson qu’on aime, ça fait chaud au coeur ! Merci à tous ceux qui ont rendu cette soirée possible . Ce fut une très belle soirée …

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