Jean-Philippe Vauthier, non JePh t’es pas tout seul !

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Mercredi 2 septembre 2015. Jour de rentrée hors les murs pour ma pomme. Les vacances c’était bien mais c’est bien fini. Ce matin ma gosse faisait sa rentrée à l’école maternelle. Grosse pression. Gros changement.

Photo David Desreumaux
Photo David Desreumaux

Il y en a un autre qui faisait sa rentrée sur une terre inconnue en ce premier mercredi de septembre. C’est Jean-Philippe Vauthier. Leader et moteur du groupe Tournée Générale qui fête cette année ses 10 ans d’existence, moitié également du duo Rouge-gorge qu’il compose avec son frère Maxime. Grosse pression car Jean-Philippe devient JePh. Un artiste tout seul qui se lance dans l’expérience de chanteur en solo donc. Ça commençait ce mercredi, c’était au Connétable, rue des Archives à Paname et ça va se jouer jusqu’à fin décembre, tous les mercredis. Nous autres, on assistait donc à la première officielle en solo de ce gaillard qui a déjà arpenté tant de scènes. Eh, je t’assure Hexagonaute, il avait un peu les chocottes le Jean-Phi ! Remarque c’est normal, en plus c’était blindé pour cette première !

Juste avant le concert, je l’ai pécho dans la salle pour lui poser quelques questions. D’où peut bien lui venir ce désir de nouveau départ, tout ce genre de trucs tu vois. En fait, Jean-Philippe explique que « ça répond à une envie qui me taraude depuis pas mal d’années. L’envie de m’affranchir et de sortir de l’habillement musical que peut offrir la vie du groupe pour aller à l’essence même de mes textes, de mes musiques et de l’interprétation. L’envie de m’imposer comme un chanteur. »

Photo David Desreumaux
Photo David Desreumaux

Et il n’a pas fait fausse route le gars vosgien, Hexagonaute, je te le dis en un mot comme en cent. Ce tour de chant a permis de découvrir un colosse au cœur d’argile, une armoire sans armure, à poil derrière une guitare nylon à égrener et arpéger ses sentiments, à réécrire la Carte du Tendre du côté de la vraie vie. Par celle de Hollywood. Pour l’occasion, Vauthier n’est pas allé puiser dans le bagage existant. Ce projet solo, c’est que du neuf. « C’est uniquement des nouvelles chansons. C’est une des raisons du nouveau projet. Avec Tournée Générale, on a une couleur musicale presque marquée d’un sceau, très identifiable. J’avais plein de nouveaux textes qui arrivaient que je ne voyais pas inclure à l’univers de Tournée Générale. Le propos était trop radicalement différent. Je parle beaucoup de moi dans ces nouvelles chansons, c’est très personnel, intimiste » confesse Jean-Philippe. Intimiste, c’est bien le mot.

Intimiste et à fleur de peau également ce garçon désireux de (re)partir à l’aventure, de se mettre en danger, comme vierge de tout. « Dans le processus de création avec TG, c’était mes chansons qui se retrouvaient arrangées par tout le monde. Là, ces chansons je veux les défendre tout seul pour que ça me fasse voyager. C’est comme si je prenais mon sac à dos et ma guitare. J’aime bien me mettre en danger, en situation de rencontre, de découverte, d’échange. J’ai pu constater en ayant fait un ou 2 concerts de rodage que sur scène il se passait quelque chose, que j’étais amené à aller chercher des choses en moi que je n’allais pas chercher avec le groupe parce qu’il y avait la présence des autres musiciens. Ça va dans le sens de l’affirmation ce projet et ça répond à une envie de grandir. D’avancer dans la vie. »

Photo David Desreumaux
Photo David Desreumaux

Avancer dans la vie, c’est aussi se prendre des baffes dans la gueule, essuyer des râteaux et connaître des ruptures douloureuses. C’est un apprentissage par l’expérience. Ça pique les yeux et ça fait mal mais JePh joue l’alchimiste et transforme ses douleurs, ses peines de cœur en chansons. La rupture amoureuse, omniprésente, semble bien être le souffle créateur de ce nouveau projet. Rupture convoquée sous différents modes. Mais jamais larmoyant même si je t’avoue, Hexagonaute, avoir parfois eu l’alarme à l’œil. Je te joins en vidéo Petite. Cette chanson, peut-être, dresse le meilleur état des lieux possible de Jean-Philippe à l’instant T. Un constat d’une souffrance en cours de résilience gravé dans le marbre des souvenirs encore verts. Les plus belles chansons d’amour sont assurément celles des amours mortes qui contrairement aux feuilles ne se ramassent pas à la pelle. « Ils ont passé pour te plaire et m’envoyer en enfer Foule Sentimentale. Petite, tu m’manques déjà, tu voudrais pas qu’on s’quitte comme ça ! Tu sais, petite, le penchant que j’ai pour toi, le mal qui m’habite quand t’es pas là. J’ai marché pendant des plombes, sous l’averse de bombes qu’allumait ton deuil. J’ai traversé les décombres, visité de fond en combles notre cercueil. J’ai complété dans l’alcool ma collec’ de casseroles, aggravé mon cas. » Avant de finir par ce couplet fondateur du projet JePh en somme : « Maintenant, j’veux plus rien comprendre, juste exister et apprendre à vivre sans toi. J’ai tant d’amour à revendre, de liberté à prendre et tant de combats. »

Photo David Desreumaux
Photo David Desreumaux

De la belle chanson de facture populaire tout ça. Une poésie simple, un regard posé sur les petits bonheurs d’un quotidien qui s’émiette, sur le souvenir d’un être aimé parti mais qui n’a jamais été aussi présent. On ne possède vraiment que ce qu’on a perdu. Et puis, hors l’amour, il y a plus fort et viscéral chez JePh, il y a une béquille inoxydable, il y a l’amitié. Imprescriptible amitié. Comme cette superbe Chanson pour Gauvain qu’il a écrite pour le « fier écuyer de lune, le frère de plume, » le copain de chambrée de chanson. Chanson en réponse à la Rue de Bagnolet de ce Gauvain Sers, ami-muse en quelque sorte comme le soulignera Jean-Philippe. Une autre chanson très belle qui parle du Papa, toute bouleversante, vient apporter un autre type de sentiments dans ce tour de chant.

C’était une première, je te l’ai dit. Alors, évidemment, il y avait encore toutes les imprécisions, les imperfections liées à un démarrage, à un spectacle qui est à l’aube de son rodage. Un travail sur l’entre-chansons par exemple est encore à faire. Mais ce n’est que le début, tout cela va se mettre en place, se caler et ces ajustements viendront parfaire un spectacle des plus prometteurs. Un spectacle qui présente un Jean-Philippe Vauthier dans son plus simple appareil, sur le fil d’une émotion qui parcourt ce spectacle du début à la fin. Un type qui se met à nu, à la fois humble et déterminé laissant apercevoir toute l’humaine condition dans l’évocation des relations de l’Homme envers ses semblables. C’est touchant, ça fait mouche. Ça fait mouche parce que le garçon avance dans le noir et sans fard, à cheval sur l’espoir et sur les cahots d’une vie qu’il ne cherche pas à dompter. Mais à vivre à chaque instant. Tout simplement.


4 Commentaires

  1. Alors comme ça, c’est plus  » Tournée générale », monsieur chante en Suisse ! Et en effet, c’est tout à fait différent, comme en témoigne  » Petite », de belles chansons, faites à la main, à la pointe du coeur, aux blessures de la vie, bonne route à lui donc, et à suivre …

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