Le 17 mai, Sébastien Kunz était sur la scène du Théâtre de l’Atalante pour le concert de sortie de son EP Les idées volent. Une belle soirée dans un joli lieu du quartier de Montmartre, et avec un public venu nombreux ! Suite à ce concert, je lui ai posé quelques questions pour en savoir un peu plus sur son univers musical et ses projets.
Hexagone : Le concert de sortie de ton EP Les idées volent a eu lieu il y a quelques jours au Théâtre de l’Atalante. Comment s’est passé cette soirée ?
Sébastien Kunz : C’était une très belle soirée ! D’abord le lieu est très sympa… Le théâtre de l’Atalante est un très bel endroit et sa jauge de 60 à 80 places permet, lorsqu’on est en démarrage de projet comme moi, de ne pas avoir l’impression d’une salle vide si on ne remplit pas. C’est rassurant par la taille. Mais, on a fait salle comble (on m’a dit qu’il y avait du monde jusque dans l’escalier qui mène à la salle !), ce à quoi je ne m’attendais pas. Donc ce fut une belle surprise ! Et du coup, un public hyper réactif, au rendez-vous, généreux et bienveillant ! Il faut dire qu’une partie nous connaissait déjà dans des formules plus acoustiques ou dans les concerts plus intimistes que nous (ou que « je » parfois) avons fait jusque là. Mais il y avait aussi pas mal de gens qui découvraient le projet pour la première fois. Dans ce public, certains étaient mes ululeurs, ceux qui avaient pour contrepartie une place offerte avec un de leurs amis, mais ce n’était pas la majorité. Et parmi ces ululeurs certains avaient un accès backstage juste avant le concert et ce fut aussi un bon moment d’échanger avec eux parce que ce sont de très bons potes, et que juste avant le concert, ça aide à faire tomber un peu la pression ! Donc un public super au rendez-vous, de bonnes conditions de scène car Pierre l’ingé son et Etienne à la lumière avaient tout bien préparé ! Toutes les conditions étaient réunies pour que nous assurions le show… et j’avais des surprises !!!! J’ai eu le plaisir d’avoir de beaux invités pour ce concert avec la présence de Karen Lano, qui vient de sortir un très bel EP et qui prépare la Release Party (le 1er juin), de Floh, un artiste à l’orientation Folk et Electro que je connais depuis pas mal de temps, on se croise régulièrement, et Tara, une artiste solaire que j’ai rencontrée il y a quelques temps et avec qui nous avions déjà travaillé une chanson pour un concert précédent. Ce fut du coup un vrai plaisir de pouvoir partager ce moment avec eux !
Hexagone: Tu étais accompagné sur scène par deux musiciens. C’est la formule dans laquelle tu as envie de faire évoluer le projet ?
Sébastien: J’ai deux fantastiques musiciens qui ont accepté de m’accompagner sur ce projet : Frank Nelson, à la basse et Jean-Jacques Cirillo à la batterie. Frank est sur le projet depuis les prémisses puisque dès l’origine nous avions un des morceaux (Regardless of my pain) où il m’accompagnait à la basse fretless. Et ce morceau est à l’origine de la présence de cette basse particulière sur le projet. C’est une sonorité qui a de l’importance dans le rendu global. Les lignes mélodiques que Frank a imaginées sur mes compositions apportent autant l’assise qui est le rôle habituel de la basse, mais aussi une voix d’accompagnement par des interventions médium-aigües qu’il ajoute. Rythmiquement Jeannot travaille autant en force qu’en finesse pour traduire l’univers des compositions, en passant d’un jeu de batterie puissant et solide à un jeu plus atmosphérique, plus dans des ambiances ou de la narration au travers de diverses percussions. Aujourd’hui, par la richesse de leurs apports respectifs, cette formule en trio constitue un bon noyau de projet. Dans un futur un peu plus lointain, si les moyens le permettent, j’imagine très bien pouvoir ajouter des cordes, des accompagnements de voix, des arrangements complémentaires. Mais leur apport ne pourra se faire qu’en accord avec ce qui existe déjà, pour préserver l’identité que nous avons construite en trio.
Hexagone: Parlons un peu de cet EP. Comment a-t-il été créé, et avec qui as-tu travaillé ?
Sébastien: L’écriture de la plupart des compos de cet EP s’est faite en 2011 / 2012, j’avais réuni une première équipe à l’époque (dont Frank Nelson faisait déjà parti) mais les textes et la musique étaient encore trop « verts » dans ma tête… J’ai eu un processus assez long de recherche autour des chansons, de remise en cause du style, j’ai testé plein de choses mais je ne m’y retrouvais pas. Un jour j’ai décidé de travailler ma voix car, autodidacte, j’avais besoin d’un travail technique que je n’avais jamais abordé. Je cherchais donc un cours. En parlant de ça avec un ami, il me dit qu’il a rencontré quelqu’un de formidable, qui donne des cours de chant et qu’il pensait à l’époque que ça me correspondrait bien. Il se trouve que cet ami est de ceux qui, quand ils vous disent ça, on les écoute… Du coup je suis d’abord allé à la découverte de « Pagan Poetry » , projet musical de Nathalie Réaux dans un premier temps, sur les concerts acoustiques donnés dans ce lieu secret que beaucoup ont eu l’occasion de découvrir à Paris, pour ensuite rencontrer Nathalie Réaux qui m’a d’abord fait travailler la voix puis, un jour, lors d’une séance, m’a orienté sur le style que je cherchais sans le trouver depuis 3-4 ans : pour elle il était clair que j’étais dans un registre FOLK ! En tout cas c’est ce qui se dégageait quand je lui jouais mes compos en guitare et voix dans son salon ! Partant de là, Nathalie m’a aidé à caler les arrangements des démos qui ont ensuite donné naissance aux versions définitives des titres de l’EP.
En parallèle de ce travail personnel, j’ai travaillé avec Frank Nelson pour caler toutes ses parties de basse Fretless sur les démos avant l’enregistrement. Une fois les démos prêtes, nous sommes allés enregistrer tout ça en Bourgogne, chez A’Dar Studio, un studio fondé par deux potes : Yann Pompidou et Yanal Zeaiter, que j’avais rencontré aux Franc’Off (un vrai off pendant les Francofolies de la Rochelle qui aujourd’hui a disparu mais qui reste pour moi synonyme des meilleurs moments que j’ai passés dans ce festival ) et qui, en dehors de jouer avec des gens que je connaissais à l’époque, avaient le projet « Mothers of Love », une folk expérimentale très léchée. Donc je savais qu’il comprendrait ce que je voulais faire et qu’on allait bien s’entendre. Nous avons passé 10 jours chez A’Dar Studio, Frank et moi, à tout enregistrer. Le premier soir, à notre arrivée, nous avons fait la connaissance d’un ami de Yann et Yanal, qui repartait le lendemain, un batteur, et c’était Jeannot. Comme ça avait bien matché entre nous à ce moment-là, lorsqu’il s’est agi de trouver un batteur pour le projet, nous lui avons proposé de nous rejoindre. Il a accepté. L’équipe était faite… Et quelle équipe ! Suite à nos 10 jours d’enregistrement, Yann Pompidou a géré les mixes et m’a conseillé de confier le mastering à La Villa Mastering à Montreuil, ce que j’ai fait. Pour la partie physique, j’ai travaillé avec Maxence Gandolphe de Witte pour les photos. Max suit le projet en image depuis le début. Il arrive toujours à traduire mes idées en visuel ou à proposer des idées qui vont dans le sens du projet, avec une esthétique très soignée. Il maîtrise son art de très belle manière, et les images de moi que nous arrivons à faire ensemble me plaisent… C’est un critère sur lequel je suis très difficile ! C’est vraiment très agréable de travailler avec lui pour tout ça.
Hexagone: Quels sont les artistes qui t’ont marqué / influencé ?
Sébastien: Dans les artistes qui m’ont marqué et que je peux directement lier à ce que je fais musicalement, il y a Les Doors, Led Zeppelin, mais dans les trucs 70’s j’ai aussi Jethro Tull, Kansas et leurs cordes si classes, Neil Young forcément avec Harvest mais aussi l’album Déjà Vu de Crosby Still Nash and Young, Sixto Rodriguez et ses textes puissants… Plus récent : Hugh Coltman, Eddie Vedder (mais déjà l’album Ten de Pearl Jam était kiffant à l’époque), BRMC, The Trousers, plus gras et blues mais présents aussi… En français il y a Noir Désir, Bashung (découvert sur le tard), Damien Saez, Tété, Pauline Croze, Franck Monnet et dernièrement La Maison Tellier… Après, le problème c’est que j’écoute de tout donc on n’est pas à l’abri d’une influence classique ou d’un retour de Guns’n’roses arrosé d’un cri primaire à la grande époque de FFF…
Hexagone: Qu’est ce qui te donne envie d’écrire et de composer ?
Sébastien: J’observe beaucoup et je questionne tout… Du coup notre quotidien me donne envie d’écrire. Le bien contre le mal, les sentiments… compliqués, les comportements humains, l’injustice, la vie et la mort, nous, toi, moi… Et du coup, j’ai l’envie de raconter tout ça. Parfois j’ai l’impression qu’on a perdu de vue l’essentiel, la vie, l’amour, l’humanité, la simplicité… donc j’écris des textes un peu comme des bouteilles jetées à l’océan humain, en espérant qu’à leur ouverture, le message fasse son bonhomme de chemin, suscite une réflexion, apporte du bien, et que ce bien se propage à son tour.
Hexagone: Si tu ne devais choisir qu’un seul des titres de cet EP, ça serait lequel, et pourquoi ?
Sébastien: Les idées volent car ce titre est très actuel. Je l’ai écrit en 2012 en fin du règne de Sarkozy 1er, où l’ambiance sociale déjà était électrique, où la seule réponse de l’état était la démonstration de force… un peu comme maintenant finalement… La période électorale aidant, la créativité de nos chers politiques à nous apporter de nouvelles idées pour vendre leur élection était au top. Aujourd’hui, on voit au travers des mouvements sociaux que les gens n’en peuvent plus d’être pris pour des moutons (ou des vaches à lait ça dépend) et une partie de ces gens a très bien conscience des leviers que les politiques utilisent, à grand coup d’effets de manches, de langue de bois, de 49.3… Les gens ne sont plus dupes du fait que la politique ne sert plus à améliorer leur vie, ils ont bien compris qu’elle sert plus d’autres intérêts : financiers, médiatiques, d’image ou de pouvoir… Le peuple veut être acteur de sa propre société mais la politique, le système actuel, ne permet plus ça… Ce système n’est plus au service des gens, et ne donne plus envie d’en faire parti… Nous ne sommes plus dans un système vertueux. Au travers de cette chanson, j’ai voulu expliquer que le système ne fonctionne que parce que les gens le laissent fonctionner. Parce que finalement, qui sont les plus nombreux ? Le refrain de la chanson fait donc écho à cet état qui nous viole nos liberté d’expression, de rassemblement, de vie… Et les belles idées qu’il développe, que l’opposition développe, qu’on développe… Des leurres qui étouffent le reste. Cette chanson est une invitation à réagir.
Hexagone: Pour sortir ce disque, tu as lancé un financement participatif. Quels sont les avantages ? Quels rapports as-tu avec tes « co-producteurs » ?
Sébastien: Effectivement, pour lancer le disque et faire le concert de sortie, j’ai fait un Crowdfounding, ou financement participatif, pour lever les fonds nécessaires. La musique est certes un art (mineur pour la chanson dirait Gainsbourg), c’est aussi une entreprise humaine et financière. On est obligé d’avoir de l’investissement pour payer ceux qui rendent cet art vivant et pour le développer. J’ai à coeur de développer professionnellement mon projet, en tout cas suffisamment pour que la vente du spectacle puisse rémunérer tout le monde. Et j’avais besoin d’un coup de pouce pour mettre le projet en lumière sur ce lancement. J’avais vu pas mal de projets qui réalisaient leur levée de fond via le financement participatif et je me suis dit que la formule semblait intéressante. Nous avions réalisé les enregistrements, j’avais de la matière pour faire 45 jours de communication et nous avions un peu de public qui nous suivait lors des concerts donnés jusque-là. J’ai donc franchi le pas. Les avantages du financement participatif sont que chacun y trouve son compte, par le système de don contre des contreparties. Du coup les gens donnent et peuvent avoir le retour sur ce qu’ils ont donné. Ils peuvent suivre le projet aussi. J’aime bien le fonctionnement qui me fait penser aux AMAP, sans intermédiaire et dans lequel chacun y trouve son compte. De mon coté je fais des newsletters pour tenir au courant mes Ululeurs de l’évolution du projet et le fait d’avoir eu ces « Co-producteurs » me donne l’impression d’avoir des gens plus proches du projet, d’avoir du soutien, de l’adhésion… L’impression d’être sur le bon chemin puisque j’y croise de bonnes personnes qui me disent : « C’est par là ! ». Du coup c’est hyper encourageant et j’ai l’impression qu’on a vécu un truc particulier ensemble. C’est un privilège de se dire que des gens croient suffisamment dans votre projet pour y investir une somme d’argent. Et puis ça oblige à faire les choses bien, par retour… Pour leur confiance.
Hexagone: Quels sont tes projets pour les prochains mois ?
Sébastien: Je prépare des dates pour la rentrée, en septembre, quelques dates acoustiques sur Paris et une date électrique dans un lieu Parisien dans la 2e quinzaine d’octobre. Cet été je veux tourner un peu du coté de La Rochelle et en Bretagne, du coté du Golfe du Morbihan. Et puis d’ici la fin de l’année je vais chercher d’autres dates en trio et peut-être travailler un premier clip. Je dois aussi écrire une chanson cet été pour une association sportive : l’ASCAP Handball de Montbéliard, qui soutient le projet. Début 2017 je veux me mettre à l’écriture de nouveaux titres… on approche d’une période électorale, je devrais être inspiré… L’idée cette année est donc de tourner puis d’écrire pour préparer un enregistrement d’album à la fin de l’été 2017.