Laura Cahen, les Trois Baudets envoûtés.

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Photo David Desreumaux
Photo David Desreumaux

Il y a quelques semaines, je t’ai parlé de Laura Cahen. Tu te souviens ? Elle devait jouer après Cléa Vincent et Minou à la Fléche d’Or. Le 13 novembre. Oui, c’est ça, tu l’as dans le mille ! La raison tu la connais… Tu peux aller relire le papier que j’ai écrit pour te rafraichir la mémoire. Le mercredi 16 Décembre, c’était la fameuse séance de rattrapage aux Trois Baudets.

C’était une soirée SACEM, comme il y en a de temps en temps pour nous faire découvrir de nouveaux groupes. Ce n’est pas une soirée comme les autres aux Trois Baudets puisque avant que les artistes n’entrent sur scène, nous avons droit à un petit discours. On nous  présente  leur travail et on nous met en appétit sur ce que nous allons voir et entendre.

ENCART TEXTEAprès le passage de Jules et son vilain Orchestra, la scène s’est vidée, mais temporairement. Une armada de guitares a fait son apparition avec quatre électriques et une basse. Plutôt impressionnant, pourtant, rien de violent dans la musique de Laura Cahen, tout au contraire. La seule violence qui existe chez Laura est la claque qu’elle nous donne. Pour l’entendre pour la première fois, il vaut mieux assis. Notre postérieur en reste cloué au fauteuil tant son organe vocal est puissant et complexe. L’écrivain Eric Reinhardt a d’ailleurs trouvé les mots justes pour le définir: « Il y a dans sa tessiture quelque chose de tout juste arrivé, de frais, de cru, mais avec dedans du très ancien, des échos d’opérette, des résurgences de transistor, de 78 tours, de gramophone ancestral. »

Sur scène, elle est accompagnée de trois musiciens: un guitariste, un bassiste et un batteur. Les instruments et sa voix donnent vie à ses mots. La musique commence presque toujours sur un moment de tranquillité pour progressivement nous emporter dans ses méandres. Il y a des couleurs, des sensations dans chaque note, un mouvement perpétuel comme le vent, loin d’être linéaire mais toujours fluide. Sur un titre comme Les cigognes, Laura Cahen semble appeler les émotions à elle, tout en les extériorisant. Elle parle en métaphores, évoque des éléments extérieurs pour parler de son intériorité. « Lumière dans les roseaux, je fais le point. A vol d’oiseaux je te rejoins. Je plie, je suis le roseau qui danse dans le vent. Tu es le vent. » chante-t-elle sur Les Roseaux.

Sur Loin, c’est seule qu’elle commence à jouer à la guitare. Sa voix, elle aussi part haut. Elle « fout le camp » avec poésie, on pourrait presque sentir la cadence de ce cheval qui la porte et participe à sa cavale. Quand elle s’est mise à parler, c’est presque avec surprise que nous avons découvert sa voix, discrète voire un peu timide. Elle a improvisé un poème sur les saisons, a aussi évoqué ce 13 novembre avec émotion. « La prochaine chanson, je l’ai écrite il y a quelques années. C’est une histoire d’amour mais qui aujourd’hui résonne étrangement. » Son titre, Etrangère, évoque Paris. La batterie se fait plus oppressante. En fond, des bruits désagréables nous donnent une drôle d’impression. On comprend l’écho avec ce vendredi noir. Le titre le plus aérien est probablement Froid, quand se joignent en chœur les voix de Laura et de ses musiciens. Elle alterne entre une voix de tête et de poitrine ainsi que des vocalises, créant des tonalités contrastées. « Les oiseaux sans manteau ni bonheur sont allés vers le nord, aussitôt, se noyer, se geler vers le nord. » Les images évoquent un monde particulier, entre rêverie, froid polaire, désolation fertile et une vibrante simplicité.

Photo David Desreumaux
Photo David Desreumaux

Mon seul regret est qu’elle ait omis Mon loup de son set, sa chanson phare. Cependant, elle nous a dévoilé un univers différent avec son second EP O: plus grave mais également plus fouillé.

La meilleure façon de se convaincre du talent de Laura Cahen n’est pas d’écouter les discours de la SACEM ni même de lire cette chronique, mais d’aller la voir sur scène, pour qu’aucun autre son du quotidien ne vienne perturber votre écoute. Une immersion dans un univers musical intense.

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