Le Festival Nouvelles Voix en Beaujolais devait débuter ce 16 novembre, à Villefranche-sur-Saône. Les attentats du 13 novembre ont conduit les organisateurs à repousser l’ouverture à demain mardi 17 et à annuler tous les spectacles destinés aux scolaires. Pour le reste, toute la programmation est maintenue. Hexagone a interrogé Alain Moreau, son directeur et fondateur, avant les attentats de Paris. il nous a raconté l’histoire de ce festival et présenté les temps forts de cette nouvelle édition. Pour résister à la barbarie, le spectacle comme la vie doivent continuer.
Hexagone : Quelle est l’histoire du festival et comment a-t-il évolué ?
Alain Moreau : C’est l’histoire d’un théâtre qui aime la musique et la chanson, et celle d’un directeur qui décide de créer un festival il y a 10 ans. Le festival a été créé en 2005 et c’est donc cette année notre 11ème édition. Notre festival a choisi de soutenir la jeune création chanson et nous avons maintenu cette rigueur artistique jusqu’à aujourd’hui. Nous sommes dans un théâtre de ville à la programmation pluridisciplinaire, qui créé un festival chanson dans toutes les esthétiques des musiques actuelles. En 2005 nous avions aussi le projet d’ouvrir une salle de musiques actuelles. Le festival a perduré mais malheureusement la salle n’a pas pu être ouverte. L’autre dimension du festival est sa coïncidence avec le Beaujolais Nouveau qui part dans le monde entier, le 19 novembre. Je trouvais donc intéressant d’avoir une manifestation artistique au même moment. Car nous avons des points communs : nous sommes jeunes, nouveaux et dans la modernité. Le Festival est une sorte de clin d’oeil au Beaujolais et les unions viticoles font partie de nos partenaires. Nous avons tout de suite trouvé une collectivité pour nous accompagner, la communauté d’agglomération de Villefranche-Beaujolais qui est notre premier partenaire. Ce partenariat s’est pérennisé par la suite. On a tenu bon sur un projet artistique qui n’est pas si évident que ça car le soutien à la jeune création ne va pas de soi : inviter des jeunes artistes qui en sont à leur premier album, parfois leur première scène, c’est ça notre identité.
Hexagone : Est-ce que le festival a tout de suite eu l’ampleur qu’il a aujourd’hui ?
Alain Moreau : A l’origine, le festival ne se déroulait que dans un seul lieu, c’est à dire au théâtre de Villefranche. On a commencé avec des artistes qui avaient une petite notoriété mais qui ont été beaucoup plus connus ensuite comme Camille. Le succès est venu dès la première édition. La Communauté d’agglomération comptait à l’origine 4 communes et nous nous sommes étendus d’abord dans ces communes-là, avec 4 lieux différents. La Communauté couvre maintenant 21 communes et le festival se déroule dans 7 lieux différents. On a noué des relations avec de nouveaux partenaires. On va par exemple chez Cultura pour des show cases. Depuis 4 ans on a multiplié les concerts éclatés sur notre territoire. Chez l’habitant, dans un Emmaüs, dans les quartiers. Et depuis 5 ans on a organisé un partenariat avec le conservatoire en offrant à un artiste en résidence la possibilité de créer un spectacle en collaboration avec la classe des musiques actuelles. Cette année c’est Dimoné qui travaille pendant 3 mois avec les élèves de la classe des musiques actuelles pour donner un spectacle au moment du festival. Au fil des années nous avons renforcé la création et l’accompagnement des jeunes artistes puisqu’on en invite tous les ans 2 ou 3 en résidence, au théâtre, au moment du Festival.
Hexagone : Beaucoup de festivals ont connu des difficultés ces dernières années mais ça n’a pas l’air du tout le cas des Nouvelles Voix en Beaujolais ?
Alain Moreau : Nous sommes soutenus en effet par des partenaires. La Communauté d’agglomération vient de s’engager à nouveau pour 3 ans sur un apport financier relativement important. Cela nous assure en effet une stabilité que n’ont pas tous les festivals quand le soutien public est remis en cause, ce qui n’est pas notre cas. On est aidé également par la région, la ville de Villefranche, l’ADAMI, la SACEM, Cultura et l’Union Viticole du Beaujolais. L’apport d’argent public est important et financièrement notre situation est bonne. Le budget global tourne autour de 250 000 euros dont la billetterie représente 15%.
Hexagone : Quels sont les temps forts de cette 11ème édition ?
Alain Moreau : C’est difficile de demander à un père, quand il a plusieurs enfants, quel est son préféré. Je suis heureux qu’on accompagne Black Lilys, un duo lyonnais, une découverte en région, qui est en résidence depuis plusieurs semaines et qui va circuler ensuite dans tout le département. Les 3 soirées au théâtre sont aussi des moments forts puisque nous restons le lieu le plus important du festival avec notre salle de 700 places. On pourra y applaudir Luce, Radio Elvis, Black Lilys et Nach la première journée. Pour la deuxième soirée, j’ai été séduit par la singularité, le son et la personnalité de Ibeyi, deux jeunes sœurs jumelles et j’ai construit autour d’elles un programme singulier qui va de la musique pop au folk/pop de Jain et à la musique africaine de Moh ! Kouyaté. C’est une soirée à l’image d’un festival ouvert à toutes les esthétiques qui métisse les musiques pour offrir un large panel dans le domaine de la chanson. En ouverture de cette soirée, comme chaque fois, il y a un artiste lyonnais où rhône-alpin, et cette fois ci ce sera Caspian Pool qui vient d’Annecy. La dernière soirée a une couleur un peu nouvelle puisque j’ai choisi de finir avec de l’électro et on aura donc au programme le lyonnais Sin Tiempo, le suisse Buvette, puis Pérez et Hyphen Hyphen. On terminera avec Thylacine, un prodige électro angevin qui clôturera cette soirée que j’ai voulu joyeuse, dansante et festive mais dans une certaine rigueur artistique. On terminera donc en transformant le théâtre en dance floor. Ce sera le dernier concert d’une manifestation qui s’éclate dans différents endroits à Villefranche et bien au delà.