Le garçon est un iconoclaste. Ce n’est pas pour nous déplaire. Pas grand chose à vendre, pas un marchand de bons sentiments surtout. C’est pas le perdreau de l’année non plus, alors les rêves de carrière sur fond de boiseries dorées dans les palaces, si jamais ça l’a effleuré un jour (ce qui n’est pas sûr du tout), c’est oublié depuis longtemps. Seule la dure réalité du milieu est persistante. Lui, le gars dont je te cause, c’est Barthélémy. Un « Chanteur de race inférieure » comme il dit avant d’ajouter « C’est dans mes gènes qu’il n’y a pas beaucoup d’spectateurs. » Iconoclaste, je t’avais prévenu.
Depuis septembre et jusqu’à fin décembre, Barthélémy chante tous les lundis à La Petite Loge, à Paris. Une des plus petites salles parisiennes. Pas plus de 20 places. C’est du côté de Saint-Georges, Pigalle, dans ce coin-là. Je ne peux que t’inciter à aller découvrir cet oiseau rare, difficile à cerner mais qui ne manque pas d’humour. « Je préfère jouer souvent devant très peu de spectateurs qu’une seule fois devant très peu de spectateurs » répond-il quand on l’interroge sur le choix de la formule hebdomadaire de ses concerts.
Sur scène, il s’amuse à se dire « chanteur de droite », entonne une manière de gloire à Napoléon. Puis, il poursuit avec un Volontaire pour la révolution qui pourrait bien être repris en tête des cortèges de manifs bien bien rouges. Grand écart diras-tu ? Non, je ne crois pas. Le garçon est composite comme un humain normal mais tel l’artiste refusant d’être étiqueté, il brouille les pistes. Il aime provoquer. C’est aussi cela le rôle de l’artiste non ? Quand pour le situer quelque peu sur l’échiquier de la chanson tu lui demandes ce qu’il écoute, voilà ce qu’il répond : « J’écoute Gilbert Bécaud, Georges Brassens, Renaud, Michel Sardou, Serge Lama, Johnny Hallyday, Didier Barbelivien, Robert Lamoureux, Joe Dassin, Maurice Chevalier, Renaud Detressan, Elvis Presley, Chuck Berry, Bob Dylan, Johnny Cash, Johnn Hiatt, Bruce Springsteen, Bob Seger, Rodney Crowell, Toto Cutugno, Luciano Pavarotti. » Rien que ça… Fais le tri. Puis, plus tard, il ajoute : « Sinon, comme chanteur actuel j’aime beaucoup Jean Dubois. » A la question, si tu devais faire une reprise sur scène, ne crois pas que sa réponse t’aidera davantage à dégrossir sa personnalité : « Si je faisais une reprise, ce serait soit La Danza de Rossini, soit Marinella de Tino Rossi. Je pourrais faire aussi I need your love tonight d’Elvis Presley. Et Don Juan de Brassens » informe-t-il.
Qu’importe tout cela, ce que l’on retient, c’est que le garçon sait faire des chansons, de jolies par dessus le marché. L’écriture est souvent subtile même pour dire les choses frontalement. Si la question sociale et politique est ancrée au cœur du propos de l’oeuvre de Barthélémy avec des chansons comme Volontaire pour la révolution ou Les sectes démodées, la poésie tendre et nostalgique n’est pas laissée-pour-compte sur un morceau comme Montreuil-sous-Bois, par exemple. L’humour et la fantaisie ne sont de même pas renvoyés sur le banc des indésirables. Nombre de titres abordent des sujets sensibles par le biais du décalage humoristique : Incinéré au feu de bois, Le déménagement de Vincent, La poire en deux, etc. Le tout toujours servi avec le sourire, un drôle d’accent, des rouflaquettes aussi impressionnantes que son ceinturon Elvis. Chanteur de race inférieure ? En tout cas, aux influences ostensibles supérieures !