Mick à Avignon – Session 1 : Emanuel Bémer

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Et me voilà à Avignon, une année de plus. Il fait chaud (plus que l’an dernier !), le programme du off comporte un grand nombre de spectacles (plus que l’an dernier !), beaucoup de monde dans les rues (par rapport à l’an dernier ? je ne sais pas, je n’ai pas compté !). Je prends l’apéro à côté de théâtreux parisiens et j’entends « si tu veux te faire voir par le métier il faut venir à Avignon, tout Paris est là, tu vois tout le monde.» Je ne connais pas beaucoup de parisiens et encore moins de théâtreux parisiens et si j’en ai peut être croisés, je n’ai pas parlé à un seul (vu que je ne les connais pas !). Je vis à Toulouse et je vais voir quelques concerts chanson. Et bien c’est pareil, en deux jours, j’ai croisé le tout Toulouse de la chanson ou plus précisément le tout Bijou : l’ancien patron, le nouveau, le chargé de com, l’ingé son, un chanteur toulousain passé au Bijou, un artiste parisien passé au Bijou cette saison !

bemer-15-07-2015-@michel-gallas-1130613Mais pour une fois laissons Toulouse de côté, je suis à Avignon pour te parler des concerts du festival off. Aujourd’hui on commence par le premier qui m’a marqué : Emanuel Bémer, L’impossible anthologie de la Chanson française. Emanuel Bémer chanteur lorrain, j’avais  apprécié son humour, ses textes un peu décalé et sa personnalité rapidement sur 20 minutes dans un Osons au Bijou il y a un peu plus deux ans, en solo guitare chant. Mais la Lorraine c’est loin de Toulouse et je n’ai pas eu l’occasion depuis de le voir sur un concert complet. A la lecture de l’affiche je me suis dit encore un artiste – auteur compositeur interprète – qui n’arrive pas à complètement percer avec son propre répertoire et qui fait un spectacle de reprises. Et je me suis trompé. Oui c’est un spectacle de reprises mais c’est un spectacle réussi, original et personnel. D’abord le choix pour honorer la chanson française de chanter environ la moitié du temps en … pas français voire même en étranger. Et oui idée simple mais efficace : une sélection de chansons françaises qui ont dépassé nos frontières. Il est donc naturel de les chanter dans la version ayant eu du succès dans un pays. Joli prétexte à un voyage musical autour du monde.

Photo Michel Gallas
Photo Michel Gallas

Bémer commence et finit allongé sur le piano. Il démarre, en hongrois et en français, surprenant le public par une version de Sombre Dimanche chantée initialement par Damia. On aura droit bien sûr à de l’anglais, de l’allemand (sur Göttingen attendu et bienvenu) et de l’espagnol. Mais aussi du Néerlandais sur une chanson émouvante de Serge Reggiani mais pas la plus connue : Ma dernière volonté ; et ce jour des néerlandais ou des néerlandophones, présents dans la salle reprennent le refrain par cœur confirmant l’introduction de Bémer qui annonçait cette chanson comme un grand succès en Hollande. Certains moments de scène sont marquants. Par exemple, la surprenante et réussie version algéroise d’Hexagone : Je m’en fous que je recommande à tous.  Le Que je t’aime de Johnny Halliday en japonais pour lequel il se permet d’ajouter quelques mots japonais bien connus des français mais complètement hors contexte pour cette chanson. Mais il ne se contente pas des chansons françaises ayant fait le tour du monde.  Par souci de pédagogie (?) ou par originalité il nous interprète aussi des succès français qui sont en fait des adaptations de versions originales étrangères. Comme Amor de mis Amores version originale d’Amérique du Sud de La Foule succès de Piaf et O que sera du brésilien Chico Buarque en portugais version originale de Tu verras de Claude Nougaro.

bemer-15-07-2015-@michel-gallas-1130657Et quand il nous apprend que «Trobar» signifie «écrire des vers destinés à être chantés» : on se demande si ce verbe est directement dérivé de nos troubadours ?  Ce spectacle sous titré « La chanson française a-t-elle vocation à le rester ? » aurait aussi pu se nommer « La chanson française prend des cours de langue.» En tout cas Bémer fait apprécier sa voix et sa qualité d’interprète. Mais pas que … Les choix de mise en scène valorisent aussi cette Impossible Anthologie. Un superbe piano se révèle un personnage à part entière du spectacle. Et le plateau est complété par un globe, un globe-bar, gage de voyage, qui permet au chanteur d’aller chercher quelques objets comme par exemple une autre paire de chaussures pour faire des claquettes. Ce spectacle musical piano voix donne l’occasion au pianiste Nicolas Arnoult, l’accompagnateur en chapeau costume gilet, de donner la répartie au chanteur et de nous offrir quelques instants uniquement musicaux pour quelques standards dont La vie en Rose, C’est si bon, Les feuilles mortes. Mais toi l’hexagonaute aussi polyglotte comme moi, ne t’inquiète pas, le spectateur a droit aussi à ses moments uniquement en français.

Photo Michel Gallas
Photo Michel Gallas

Par exemple Emmenez moi d’Aznavour pendant lequel il rebondit sur certains mots pour enchaîner quelques secondes sur d’autres chansons souvent de la variété. Procédé connu mais exercice de style réussi et qui fait son effet. On a même droit à du Jennifer pendant … deux mots. Plus personnel A ma manière est un texte de Bémer à partir de la chanson de Claude François, Comme d’habitude. Et même à la fin du tour de chant Emanuel Bémer nous propose Ca c’est sûr qu’elle est belle la vie, chanson écrite et composée par … lui. Et la réussite de ce spectacle s’explique très certainement par cela : c’est un spectacle personnel de Bémer qui a mis sa sensibilité, sa personnalité et son humour. Humour très présent dans les transitions entre chansons en mêlant respect et moquerie. Ce spectacle est assez récent mais Emanuel Bémer chante depuis plus de dix ans et a déjà publié plusieurs albums. On peut souhaiter à cette Impossible Anthologie de voyager beaucoup et loin. Je sais, qu’entre autres, deux programmateurs Toulousains sont venus et ont apprécié. Et on peut espérer qu’une fois ce spectacle reconnu, Emanuel Bémer pourra à nouveau montrer ses propres créations. Bien entendu, tu peux compter sur moi, si ce spectacle passe par Toulouse ou Paris, pour te faire un signe hexagonal.


Emanuel Bémer 15 juillet Avignon Théâtre de l’Arrache-coeur

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2 Commentaires

  1. Belle appréciation de ce spectacle que nous connaissons déjà un peu en Lorraine et qui ne nous laisse jamais indifférents. Un artiste aux multiples talents, et bien accompagné !

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