Missonne en pleine lumière

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Photo David Desreumaux

C’était le 30 septembre dernier, au 18 cité Bergère, à Paris. Une adresse que tu connais, toi l’infatigable arpenteur de concerts de chansons, puisque c’est celle du Limonaire. Figure-toi que ce mercredi qui venait fermer la porte du mois de septembre, Missonne présentait son nouvel et premier album. Panique Attentionnée que c’est son titre. Réalisé par Patrick Pernet. Aujourd’hui, dans les lieux branchés, on appelle ça une « release party ». Une teuf de sortie d’album.

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Photo David Desreumaux

Missonne, sur Hexagone, on en a parlé à quelques reprises et notamment lors des représentations de Paris n’est pas mort, en début d’année, aux côtés des potes de la Manufacture Chanson, Jean-Philippe Vauthier et Gauvain Sers. Son projet artistique est encore récent, mais on notait cependant le fort potentiel ressenti sur 2 ou 3 morceaux. Mais 2 ou 3 titres, c’est peu pour se faire une idée très précise et cette présentation plus longue d’un album sur un set complet allait fournir l’occasion de valider ou pas tout le bien que l’on pensait de la Missonne.

Je ne vais pas te faire durer le suspense bien longtemps et comme dans un polar bien fichu, je te donne la clé avant de t’expliquer. Oui, Missonne a confirmé, validé son billet vers la considération hexagonale. Alors, ça donne quoi, te demandes-tu ? C’est naturel.

Tout d’abord, il n’est pas inutile de dire ou rappeler que Missonne est non-voyante. Ça peut sembler saugrenu et déplacé de dire ça aussi directement mais c’est à dessein, car de son handicap, Missonne en tire une force. Elle en joue volontiers, s’en amuse et nombre de ses chansons abordent avec beaucoup d’humour et de détachement la cécité. Avec beaucoup d’humour, de culot et dans une langue jeune et moderne qui peut contraster avec le personnage Missonne qui s’affiche derrière son piano. Dans une pure tradition du piano-voix, la jeune chanteuse vêtue d’une robe noire classique renvoie en aller simple à l’image d’une Juliette ou d’une Barbara. Voire plus loin encore avec cette dégaine années folles.

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Photo David Desreumaux

De la Barbara période cabaret où elle chantait Harry Fragson notamment, Missonne a retenu et fait siens quelques mécanismes d’écriture. Je pense notamment à des morceaux où le dialogue – voire la conversation – s’installe habilement pour générer l’effet comique. En son temps, ce Fragson repris par Barbara réussissait un coup de maître avec Les amis de Monsieur. Aujourd’hui Missonne fait marrer les salles avec des chansons comme La Missonne au quotidien ou Vive les conneries que tu peux entendre ci-dessous en vidéo filmée pour l’occasion. Même formule, même ressorts que ceux utilisés par les chansonniers de la fin du XIXème siècle. Mêmes ressorts mis à la sauce contemporaine et l’on constate ici très clairement que la chanson populaire n’est pas morte et plaît toujours…

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Photo David Desreumaux

Mais attention Hexagonaute ! Si la Missonne a mis dans son set et son disque beaucoup de morceaux du registre précédemment énoncé, du réalisto-humoristique, il ne faut pas croire que c’est là sa marque de fabrique exclusive. Son piano n’est pas monocorde. Missonne n’a rien d’une grande voix mais elle possède cependant des capacités surprenantes qui lui permettent de jouer sur les intonations, les hauteurs, les effets, etc. Elle a aussi un don d’imitation et d’entertainer évident dans la veine d’un Roberto d’Olbia. On est surpris et hilare à l’écoute de la parodie de tube FM décervelé qu’est Je survis à l’intérieur de moi notamment. Comme on est embarqué par les ambiances plus jazzy sur lesquelles Missonne pose une voix claire qui dès les premiers accords ressuscite le fantôme des sœurs Dorléac mises en scène par Jacques Demy sur les musiques de Michel Legrand. Certains titres sont une manière de projection dans le merveilleux d’une Peau d’âne par exemple (Le pouvoir du son). L’imaginaire prend, chez Missonne, une place d’intérêt où le loufoque et le superflu des personnages le dispute à l’émotion qui se dégage de la voix et des mélodies. Sa qualité de performeuse musicale, à la voix protéiforme, tient pour sûr à la grande qualité de son écoute, de son oreille.

Peau d’âne portait une robe couleur de lune, de soleil et du temps. Celle de Missonne pourrait être couleur de lumière. A une époque un peu terne où la fantaisie se fait rare, Missonne est un lux à ne pas bouder.


2 Commentaires

  1. Elle est merveilleuse de spontanéité,de générosité et de talent indéniable de plus douée d’un pouvoir d’imitation incroyable….pour tout vous dire « vive les conneries » est une imitation qui m’est dédiée!!!,

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