Lilimarche voulait aller danser

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Photo David Desreumaux

Elle était là. Face à moi. Elle arborait ses piliers d’hérésie avec une crâne arrogance et semblait vouloir me défier comme un vieil amant reproche à sa consentante l’éloignement de ses venues adultérines. Elle était là, droite et fière. Et moche. Moche de ses figures géométriques à faire rire un dadaïste. Moi, flegmatique et n’en ayant franchement rien à carrer, je la considérais à peine, la laissant à ses légitimes complexes. Les Trois Baudets. Salle aussi déplaisante que son personnel est agréable. Je jetai négligemment ma doudoune sur un de ses sièges chiches en faux velours rouge. Ce soir Lilimarche sur Paris et monte les Trois Baudets pensai-je.

Photo David Desreumaux
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Lilimarche, c’est pas son vrai nom, il faut que je te le dise. Pour de vrai, elle s’appelle Leslie Bourdin comme Jean-Jacques mais elle est plus jeune quand même. Toujours au chapitre biographie, Jean-Jacques, je sais pas si c’est son père mais RMC.

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Lorsque je l’ai découverte en début d’année dernière, à La Scène du Canal, Lilimarche assurait la première partie de Marie Cherrier, qui elle, assurait le service après-vente d’Alain Soral. Leslie était en duo avec son guitariste et défendait son EP précédent, Au bar de l’hôtel, paru en 2014. Un premier jet plutôt très agréable. Belle présence, jolie musicalité, sans m’envoyer un uppercut dans la mâchoire, j’avais tout de même été séduit par son univers, sa fraicheur et sa spontanéité.

Hier, Lilimarche faisait la sortie de son nouvel EP, rempli de nouvelles chansons parce que c’est le principe. Y en a plein sur l’EP. Au moins pile 4. C’est aussi le principe de l’Ep sinon ça s’appelle un album. Chansons comme des Polaroïds dit la réclame qui accompagne l’objet. Remarque, c’est aussi le titre de cet opus. Chansons Polaroïds. Le projet Lilimarche est le monde parallèle de la musicienne Leslie Bourdin, musicienne pas pourrie pour un sou que tu as pu croiser aux côtés de Grand Corps Malade, Raphaël, Louis Bertignac, pour peu que tu y étais aussi. Collaborations venant récompenser des années de conservatoire qui lui ont valu prix de piano et de solfège. Classe. Tout récemment, Renaud a choisi sa musique à elle pour claquer sur son texte Ta batterie que l’on retrouve sur le dernier album de Grand Corps Malade. Si la prestation vocale du chanteur énervant y est sépulcrale, le texte néanmoins est touchant et les notes de Leslie bien posées.

Photo David Desreumaux
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Les Trois Baudets, en ce 22 février, donc. Lilimarche passait en 3ème position sur la scène. Avant elle se sont succédés Aurore de saint Baudel, une version très jeune et pas encore aboutie de Cléa Vincent, puis VPN Deluxe, comme les patates. Beaucoup de bruit pour peu de texte. Ensuite, vint le moment de cette release party annoncée. Lilimarche et ses Chansons Polaroïds. Trois sur scène. Guitare, batterie et Lilimarche au clavier. Et parfois pas. Juste à la voix. Une voix très agréable qui flirte parfois avec le timbre d’Enzo Enzo. C’est juste pour dire. Je compare pas. Une voix claire, propre. L’univers musical est très pop, léger, et parfois carrément dansant. Dans ses textes, Lilimarche ne cherche pas à révolutionner la poésie mais les histoires fonctionnent, on y voit parfois une habileté à jouer sur les sons, sur les allitérations. Pas de grandes descriptions ni de loghorrées, On est plutôt dans l’épure, dans l’évocation comme sur cette histoire de Camille : « Dans une valse lente / Elle se soulève / Elle vacille et tangue / Elle danse avec sa peine / Elle retient dans ses bras / Un petit oreiller, / Et se mèlent à ses pas / Quelques plumes tombées. / Au milieu de la foule / Comme un oiseau perdu / Elle danse et devient saoule, / Et ça sans avoir bu / Si vous cherchez Camille / Suivez les plumes tombées / Dehors ils sont cinq mille / À vouloir l’enfermer / Dans ses yeux tout l’or du monde / Quand sa voix ne tremble pas / Souvent j’ai eu peur qu’elle tombe / Mais elle est plus forte que ça. »

Photo David Desreumaux
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On peut lire dans l’univers de Lilimarche toute la génération pop depuis les années 80. Je ne citerai pas de noms, c’est inutile. Le name dropping, c’est le boulot de Delerm, pas le mien. Sache juste que Lilimarche est une jeune artiste à suivre assurément. Un pied dans la pop, l’autre dans la chanson, artiste résolument musicale, elle livre des chansons fraiches comme un Mister Freeze qui contribuent à faire tomber les frontières entre modernité et tradition. Le tout servi avec le sourire. Que demander de mieux ?


1 COMMENTAIRE

  1. Franchement, à première ouïe, cette vidéo ne m’a pas vraiment convaincue, , mais faut voir, c’est vrai qu’il pleut dehors et qu’avec mes gros chaussons pure laine, c’est pas facile de danser, Mais comme j’aime bien, par contre, l’extrait de chanson » Dans une valse lente , je vais me débrouiller pour en écouter plus ..

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